Mairie de Provins

Évènement : 80e anniversaire de la libération de Provins

La grande exposition qui a été proposée pour le 80e anniversaire de la Libération a retracé pour la première fois avec une telle envergure, les pages sombres et glorieuses des années de guerre à Provins.
Cette exposition fera date. Elle fera date car c’est la plus complète jamais proposée.
Elle fera date car elle a présenté notamment des documents issus de sources audiovisuelles privées qui n’avaient jamais encore été diffusés. Cela a nécessité un travail remarquable de numérisation et de montage qui permet, dans un film de 17 minutes, de conserver pour demain la trace des heures historiques qui ont suivi la Libération, le 27 août à Provins. Des images bouleversantes, troublantes et saisissantes à la fois.
Elle fera date enfin car des affiches originales de propagande nazie et vichyste, ont été exposées, en particulier la célèbre Affiche rouge.
Cette exposition, son organisation, sa scénographie, son iconographie, le montage vidéo et audio n’aurait pas vu le jour sans une équipe remarquable. Ce qui rend le plus fier, dans l’aventure de cette exposition, ce sont les synergies fortes entre la Ville et ses services, de belles associations provinoises et des Provinois soucieux de l’histoire de leur Ville.
Cette exposition a accueilli près de 5  000 personnes, dont près de 600 élèves, du CM1 à la terminale.
Un catalogue d’exposition a été édité, richement illustré, il reprend l’ensemble des documents exposés. Une édition à (re)garder. Un timbre poste et un cachet ont été également édités pour l’occasion.


« Depuis le 6 juin, depuis la Normandie, les Alliés avancent. L’armée allemande, déjà, en ce mois d’août 1944 avait entamé un vaste mouvement de repli vers l’Est.
À Provins, le 15 août, la Kommandantur décide de quitter la ville.
Alors que les Provinois attendent leurs libérateurs, le commandant nazi en charge de la défense de la place fixe un couvre-feu strict et extrêmement lourd de menaces pour celles et ceux qui ne le respecteraient pas.
Les jours paraissent infinis. Il leur faudra attendre le 27 août pour connaître enfin la Libération.
La bataille de Provins fut aussi violente que soudaine. Ce jour-là, à 9 heures du matin, dans le ciel se découpent les silhouettes des chasseurs bombardiers alliés. Épaulés par l’infanterie arrivant par les routes de Paris et de Bray, ils engagent le combat pour la Libération. Les batteries nazies, installées rampe Saint-Syllas et en centre-ville, profitant de la vue imprenable dont le guetteur dispose depuis le sommet de la collégiale Saint-Quiriace, répondent au feu nourri allié.
Les Provinois, retranchés dans les abris, dans les caves et sous-sols endurent ces combats huit heures durant.
Vers 17 heures, brusquement, tout s’arrête. Ceux qui oseront sortir, ils sont peu nombreux à le faire, distingueront 5 jeeps se diriger depuis la route de Bray vers l’Hôtel de Ville.
11 Provinois auxquels nous pensons perdront la vie au cours de cette journée : Jean Guinand, Joseph Yvon, Alexandre Jobert, Louis Cotterait, Théophile Chevalier, François Rorart, Charles Lefèvre, Henri Saulniers. Ainsi que Arthur Baudet, Maurice Brulant et André Barrière, tués par balle, à la sucrerie, route de Champbenoist.
À ces pertes immenses s’ajoutera, à la tombée de la nuit, le martyr indicible des innocents de Chalautre-la-Petite dont la mémoire du massacre est encore si vive dans nos consciences.
Comme dans l’ensemble du pays, la Libération fut accueillie comme un soulagement, une délivrance. Elle fut un moment de joie patriotique d’une intensité inégalée. Avec elle s’achève quatre années interminables de peur, de souffrance, de privation et d’humiliation.
Humiliation. Le mot est-il trop fort pour caractériser ce qui s’est passé le 17 juin 1940, lorsque, à peine nommé Président du Conseil suite à la démission de Paul Reynaud, Philippe Pétain choisit l’armistice et avec lui une forme d’abaissement et de honte.
En quelques semaines à peine, celle qui se croyait toujours la « première armée du monde » était balayée. La stupeur, partout en France et dans le monde, fut immense.
Défaite militaire certes. Mais également et surtout défaite politique et morale. Ce fut la défaite de l’aveuglement des gouvernements et des chefs militaires qui n’ont pas vu la menace qui se profilait à l’horizon, qui n’ont pas eu le courage de préparer le pays à se défendre et à résister.
Cette débâcle impensable ne doit pas faire oublier les 100 000 soldats français morts sur les champs de bataille en mai et juin 1940. Elle ne doit pas faire oublier les héros de Dunkerque qui ont offert le sacrifice de leur vie et de leur liberté pour permettre aux soldats britanniques de rejoindre la Grande-Bretagne. Sans eux, le sort de la guerre eut été différent.
Leur sacrifice ultime et leur sens profond de l’honneur n’ont pas suffi à couvrir le déshonneur dans lequel d’autres ont choisi de sombrer, par lâcheté, par veulerie, par indignité aussi.
Au début de l’été 40, après la capitulation, s’est ouverte une période noire, celle de la collaboration du Régime de Vichy qui a conduit la France à permettre et à commettre le pire en traquant, avec l’ennemi, les Français qui avaient décidé de résister et, comble de l’infamie, en secondant les autorités nazies, dans leur entreprise génocidaire des Juifs de France.
La France de juin 1940, c’est pourtant le refus de l’abaissement. Cette révolte, c’est le Général de Gaulle qui, le premier, l’incarnera. Farouche opposant à l’armistice, il rejoint Londres, emportant avec lui, selon le mot célèbre de Winston Churchill, l’honneur de la France.
Aujourd’hui alors que nous célébrerons le 80e anniversaire de la Libération de Provins, nous nous souvenons de celles et ceux qui se sont levés dans son sillage. Il leur fallut un grand courage moral et physique pour prendre ce qui fut la décision d’une vie.
Les Français libres et les résistants venaient de tous horizons, à l’image des lycéens parisiens du 11 novembre 1940, à l’image de Jean Moulin, à l’image des Commandos Kieffer, à l’image de ceux de la 2e Division Blindée du Général Leclerc, liés pour la vie et l’éternité par le serment de Koufra, à l’image encore des fusillés du groupe Manouchian.
Dans notre ville, ils étaient prêts à tout pour défendre les valeurs républicaines et patriotiques qui les tenaient droits dans l’honneur.
Nous pensons à Armel Thomas, à Charles Fremont, à Jean Negrevergne, à Raymond Louis et tant d’autres qui ont résisté et ne sont parfois jamais revenus de l’enfer concentrationnaire.
Nous pensons à Gilbert Chomton qui est mort sous les balles de la Gestapo. C’était le 14 juillet 1944. Il avait 28 ans.
Nous pensons à Valentin Abeille, Sous-Préfet de Provins, mort le 2 juin 1944 sous la torture. Il fut l’un des 1061 Compagnons de la libération.
Nous pensons aux 81 Provinois, morts en soldat durant la seconde guerre mondiale.
Aux 48 Provinois déportés ou internés dont 25 ont rendu leur dernier souffle dans les camps de la mort.
Nous pensons, avec une infinie reconnaissance, aux soldats venus du monde entier. Américains, Canadiens, Britanniques, Australiens, autant de jeunes hommes arrachés à leur vie, projetés sur le sol de France qu’ils ne connaissaient pas pour défendre la Liberté, notre liberté.
La dette de la France est immense. Et celle des Provinois est immense à l’égard des 3 soldats américains qui sont morts à Provins : Clifford Gardner, Joseph Hergott, George Hein.
À L’initiative de Christian Jacob, leurs noms sont gravés sur notre monument aux morts depuis 2014. Car eux aussi sont morts pour la Patrie.
Prenons conscience d’une chose : que le temps passe oui mais que les leçons que nous tirons de cette période ne doivent pas passer. Cette exposition ouverte au public jusqu’au 15 septembre, ouverte à nos élèves des écoles, des collèges et des lycées est justement un exercice historique, un devoir de mémoire pour les générations actuelles et futures, un impératif de conscience, de raison. Une forme de combat en faveur des grandes valeurs humanistes et un acte de foi en la démocratie et en la liberté.
Lorsque l’antisémitisme rode et se déploie sans honte, lorsque des régimes et des organisations autoritaires, et parfois terroristes, attaquent des pays et des citoyens de pays libres, nous n’avons pas le droit de regarder ailleurs comme certains l’ont fait dans les années 30 et 40.
Votre présence est le témoignage de notre reconnaissance, par-delà nous-mêmes, envers celles et ceux qui à ce moment de l’histoire du monde, ont souffert, ont osé se dresser et résister au péril de leur vie. Celles et ceux qui simplement et humblement ont été des braves.
Ne les oublions pas et puissions-nous mesurer, puissent les Français mesurer demain comme hier, que ce qui s’est passé en France entre 1940 et 1945 est constitutif de ce que la France et la République sont en 2024.
C’est à vous, c’est à nous qu’il revient de respecter, de protéger et de chérir cet héritage si précieux. »

Olivier LAVENKA
Maire de Provins